Le front commun des municipalités du Québec en faveur du projet de loi 9 sur les véhicules hors route (VHR) s’est gravement fissuré, hier, alors que le président de la Fédération québécoise des municipalités (FQM) a remis en question l’appui de son organisme au projet du gouvernement Charest.
Dans une entrevue accordée hier à la Presse Canadienne en marge d’une assemblée générale, le président de la FQM, Bernard Généreux, a dit qu’il n’était plus convaincu du bien-fondé des mesures prévues par ce projet de loi, qui veut notamment interdire jusqu’en 2011 toute poursuite de voisins contre les usagers et les gestionnaires des sentiers de motoneiges et de quads.
La sortie de M. Généreux est survenue au lendemain des dures critiques exprimées mercredi à l’encontre de ce projet de loi par le Barreau du Québec, la protectrice du citoyen, et la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, qui ont rejeté l’idée de suspendre un droit aussi fondamental que celui de recourir aux tribunaux.
Cette disposition est au coeur du projet de loi, qui se propose de mettre de l’ordre dans la pratique anarchique de la motoneige et du quad, et de favoriser le rapprochement entre les adeptes de ces véhicules récréatifs et ceux qui doivent en endurer quotidiennement le bruit et les mauvaises odeurs.
M. Généreux, maire de la petite municipalité de Saint-Prime, au Lac-Saint-Jean, a déclaré à la Presse Canadienne que les municipalités devront s’attendre à des lendemains difficiles si les citoyens lésés par la pollution et par le bruit des VHR sont privés de tout recours judiciaire pour faire valoir leurs droits.
Selon lui, cette situation risque seulement d’envenimer les relations entre les adeptes de la motoneige et du quad et les riverains des sentiers, alors que le premier objectif du projet de loi devrait être de favoriser une meilleure entente.
Pour la FQM, qui représente 915 petites municipalités et les municipalités régionales de comté (MRC) du Québec, il s’agit d’un virage radical par rapport à la position qu’elle soutenait en mars, dans le même dossier. Dans un mémoire à la commission parlementaire sur les transports et l’environnement, la FQM avait alors soutenu que cette «immunité» judiciaire était essentielle pour que les MRC et les municipalités puissent maintenir leurs sentiers de VHR en exploitation.
La nouvelle a causé tout en émoi chez les députés réunis en commission parlementaire pour étudier ce projet de loi, hier après-midi à Québec. Le député péquiste de Beauharnois, Serge Deslières, a repris le titre de la dépêche de PC pour accuser le gouvernement de «semer la pagaille dans les villes du Québec».
La marraine de ce projet de loi, la ministre déléguée aux Transports, Julie Boulet, s’est faite extrêmement discrète à partir de là, et jusque dans son mot de clôture. Elle a alors conclu que la seule intention de son gouvernement, avec ce projet de loi, «est de trouver un juste équilibre entre les riverains et les usagers des sentiers de motoneige et de quad et de protéger les importantes retomées économiques dans toutes les régions du Québec».
Dans sa démarche, Mme Boulet pouvait compter, jusqu’à hier, sur un appui indéfectible des associations d’usagers de VHR, de l’industrie du tourisme et du monde municipal.
L’Union des municipalités du Québec, dont les membres regroupent plus de 70% de la population du Québec, a d’ailleurs réitéré mercredi son appui à cette mesure, qui serait essentielle pour maintenir en exploitation les sentiers actuels. La FQM avait aussi été invitée à participer à cette commission, mais ses représentants, réunis en assemblée générale au même moment, ne se sont jamais manifestés.